dimanche 17 mars 2013

12 jours avant le deux ans



Ce qui est beau, avec la dépression, c'est que ça te détruit de manière égale. Pas de favoritisme ou de laisser pour compte. Ça touche à toute et toute il effouare. L'humeur, le sommeil, le corps dans son ensemble qui se prend de douleurs diverses, vraiment, la dépression applique un principe de justice, elle est équitable dans ses attaques. L'appétit, itout, est généralement atteint. Soit tu manges ta vie, soit tu es tellement plein de vide que plus rien ne peut entrer. 

Un an, sept mois et quelques jours [début octobre]

Je ne mange plus. Je n’ai pas faim. Vraiment pas faim. Depuis des semaines, le pas faim, des mois, en fait, juin, pour être vraiment précise. Du café, en quantité, histoire de me tenir debout. Un bout de toast chipoté aux petits, le matin, parfois une ou deux cuillerées de leur souper. Juste parce que, rationnellement, je sais que je dois ingérer de la nourriture.

Jamais je n’aurais cru que « manger » puisse devenir un concept aussi abstrait que le Bien ou quoi que ce soit qui me rappelle la logique formelle. Quand tu es désemparée devant ton assiette et que tu t’accroches à tes ustensiles, un peu paniquée, les mains moites, tu le sais que ça ne va pas. De même quand l’heure des repas approche et que tu sais que tu vas devoir jouer une sorte de comédie pour te soustraire aux commentaires, aux questions, aux il-faut-que-tu-manges-tu-sais. Bah, oui, je sais. Sauf que je n’ai pas faim, je ne la ressens pas la faim, aucun signal du corps au cerveau, même pas une petite crampe. Rien. Si je m’essaie, je dois mastiquer indéfiniment chaque bouchée ou l’avaler tout rond, c’est selon. Mon estomac est soit réceptif, mais qu’à de très petites quantités, soit il se contracte et le tout remonte, se coince dans l’œsophage ou me revient en bouche. C’est super. 
Tout est fade, de toute manière. 
Bizarrement, je cuisine beaucoup. Biscuits, compotes, tartes et autres. J’aime que les autres mangent. J’envie leur appétit.   

*
Au plus pire, j'ai frôlé le 85 livres. Je ne suis pas très grande, n'empêche. "Manger" fait partie de mes objectifs du jour, encore. Je dois y penser, m'y astreindre. M'y contraindre, souvent. Ritualiser la chose aide. Manger, c'est avaler de la vie. Genre. Manger ou ne plus le faire m'est apparu, bien inconsciemment, comme le seul lieu où un certain contrôle me restait. Ça peut peut-être sembler très primaire comme réflexion et comme réflexe. Je m'explique tout cela comme je le peux. Fa-que: go, appétit, go!

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire