dimanche 30 juin 2013

Les vacances

Les vacances arrivent. Deux semaines tuseule avec les petits. Je suis définitivement moins terrorisée que l'an dernier à l'idée et à l'approche de, je me sens plus en moyen de moi-même, j'ai moins la conviction d'être inadéquate dans la tâche maternante, je suis moins en carence de jus de vie. Reste que je voyais encore deux semaines à meubler. Sans arrêt. Nécessairement. Jusqu'à ce que je me dise tayeule.

De un, me semble que si je leur suis disponible et dans l'être-avec-eux tout le temps de chez tout le temps, je leur apprends cette drôle d'affaire que maman n'a pas de vie, n'a pas de besoins, n'a pas à être respectée dans ses limites, anéwé elle n'en a pas. Sauf qu'elle en a, de tout ça. Et les gens, en général, dans la vie, ont de tout ça. Fa'que je me suis dit que ce serait une leçon de vie intéressante, pour eux, que d'imposer des moments où maman est là, mais prend un café, lit une page de journal, fait pipi tuseule. Des petites affaires, là, mais déjà, ça aide mon esprit à ne pas s'emballer dans l'être-pour-autrui.

De deux, je me suis aussi remis dedans la tête qu'à deux et quatre ans, la vie, c'est sparkle, avec du rien. J'ai fait des tests, dernièrement. Manger en-dessous de la table ou encore par terre, sur une nappe, dans le salon, les laisser prendre des céréales dedans la boîte (pas de bol: foumalade), faire une guerre de fusils à eau dans la douche, boire avec une paille, aller dehors quand il pleut et sauter dans les flaques d'eau, faire une tente avec les coussins du divan... t'sais des affaires vraiment simples, des classiques. Sauf que ça les rend heureux. Dans le sens vivant de heureux: le sourire, le trépigne, les yeux qui brillent, le "encore". Ils n'ont pas besoin d'activités à grand déploiement, d'aller loin, que ça coûte une fortune. Ne-non, ils aiment qu'on s'attache une couvarte après le cou et qu'on fasse la course dans le corridor ou dans l'herbe, qu'on se roule à terre, qu'on mange avec les mains, même de la crèmaglace. 

Ça va être ça, nos deux semaines. Un genre d'éternel retour du même, le quotidien, on n'y échappe pas tant, mais y va être sparkle en ta'. Je leur ai promis. 

samedi 15 juin 2013

Ouin.

J'avais entrepris une sorte de mission pré-deux-ans-de-Fille. Je voulais relater l'année 2012, l'année de marde, parce qu'un besoin de silence et mon enlisement dans le réel m'avaient retenue d'écrire et de décrire les coups que la batte à clous existentielles se plaisaient à m'asséner. Mais j'ai un peu fouarré. Un post par jour, pendant deux semaines, ça demande un peu de temps, pis il y a eu la préparation de la fête de l'enfanterie, mais il y a surtout eu de la gêne. Plus précisément un genre de honte.

Je m'étais arrêtée en octobre, à ce jour où le Père des enfants a cessé d'être le Mari. Je me retrouvais tuseule, sans emploi avec une santé mentale très pas à son meilleur. Y'avait à peu près plus rien, là, devant. Y'avait juste les p'tits, collés su moi, dans le présent. Un esti de long présent qui ne finissait plus de pas finir. Les journées passaient, elles avaient toutes le même goût fade, le même goût de vomi remâché. Je me tenais debout parce que j'étais bien entourée, des amis qui, à chaque instant, étaient là, me poutraient. Parce que j'avais juste une envie, peut-être deux: la douche, habillée, en position fœtale et la position fœtale sul plancher. Les jours où j'avais les p'tits, je me vautrais dans ce cocon de nous, je m'enfonçais dans le jeu, je les bordais pendant une éternité. Les larmes qui, habituellement, roulaient non stop, cessaient, en leur présence. Jusqu'à ce qu'ils dorment. Fille continuait de pas faire ses nuits [elle ne les fait pas plus, détail]. Je continuais de pas manger. En décembre, mon moins de 90 livres était heureux de sa vie quand, par plaisir, je mangeais du poulet en boîte avec les doigts. La douleur du dedans, qui pulse, nous ramène au corps. Se lécher les doigts full gras, ça adoucit, momentanément, les battements du souffrant. Comme cette amie chez qui tu squattes qui te prépare un pamplemousse, au déjeûner; la proprio d'un café où tu vas souvent qui, parce qu'à te trouve un air beige, t'offre le café au lait le plus foumalade ever; Tout ce qui te rappelle que la vie peut et doit goûter quelque chose, tu y carbures. J'ai toute photographié. Pour m'aider à ne pas oublier. Le sens, celui du réel et celui avec un "s" majuscule, tient, parfois, dans le menu détail quand tout le reste a crissé le camp.

Fa'que la honte, je disais. La honte de me voir dans cet état. Un état que je préférais cacher, comme je le pouvais. Compter mon argent, devoir faire des choix à l'épicerie, dans les comptes que je pouvais payer et ceux que je ne pouvais pas, me priver de manger pour que les enfants, eux, aient de tout... ce genre d'affaires, là. L'hiver est arrivé, je n'avais pas, encore, de tâche d'enseignement parce que dans le bas de la chaîne alimentaire de la précarité. Je n'étais pas dans un état pour me trouver ni même juste chercher de l'emploi. Je n'avais pourtant pas le choix, vient un moment où l'argent, ben, y'en a plus, t'sais. Pis là, tu te regardes dans le miroir pis tu dis: "Fuck. Me semble que je suis précisément oussé que je ne voulais pas être. Jamais. Me semble que je ne devrais pas être précisément là. Me semble qu'il y a eu un fail quelque part, en chemin.".

On se garde souvent une petite gêne, dans ces moments-là. On se cache. Pis on devrait pas. C'est pas glamour, c'est certain, la précarité dans la vie. Sauf que quand on se cache, quand on se tait, quand on prétend, on s'aide pas. On alimente les préjugés, on alimente son propre malheur. J'écris tout ça et j'ai un petit tremblement, pareil. C'est fort, l'apparence. C'est ce qui nous glu toute ensemble. On aime pas ça quand ça ne sparkle pas suffisamment. Pas nécessairement pour le regard d'autrui, surtout pour le nôtre.

J'ai fini par me trouver un emploi vraiment awesome. Les choses se sont mises à aller mieux. Je suis pas mal loin de ce que j'étais, il y a quelques mois, loin du creux des creux. J'imagine que c'est ce qui me permet de narrer tout ça. J'ai un certain détachement, ça me touche moins, c'est moins "moi".

Mon team d'experts en plans fouarreux est à l'œuvre. Fils et Fille font de l'hébertisme, dans le salon. M'a aller cautionner leur sens de l'intiative pis me rouler à terre. Y fait soleil. Y'a même du vent qui fait flacotter les rideaux. Ouin.

jeudi 6 juin 2013

Deux ans, deux mois. Eurk.

Faut que je parle de Fille.
Faut que je parle du fait que j'ai une relation amour-haine avec le concept "enfant de deux ans". J'avais eu le temps d'oublier, j'avais pas nécessairement envie de m'en rappeler. Il y a du beau, dans la patente, là. L'affirmation de soi, l'autonomisation, la personnalité qui prend toute sa et la place. Et Fille, elle en a beaucoup de tout cela. Elle s'affirme fort, maîtrise le "NON", a un post doc en bacon-sul-plancher quand pas contente, elle est un party à elle tuseule, un centre de divertissement en continu. Pis elle fait tout ça en battant des cils, en penchant légèrement sa tête sul côté et en ayant une face de tu-peux-pas-m'en-vouloir-regâde-comment-je-suis-adorable. Et elle l'est.

Sauf quand elle joue avec son popo. C'est une activité récurrente, depuis quelques semaines. Assez pour que le moment de la mettre au lit soit une source d'angoisse. Et même si ça semble faire partie des étapes de développement pis toute, je ne peux pas en revenir. Le Fils nous a fait le coup, une fois. Il a trouvé ça dégueulasse et voilà, pu jamais. Pas elle. Et le Père des enfants et moi, on essaient fort. On a déployé des stratégies diverses, mais elle a et de l'acharnement et de la volonté et un sens de la persistance fa'que elle s'en juste calice de nos stratégies. Elle l'enlève sa couche et elle en étend partout du stuff de couche. Et ses yeux nous le disent qu'elle le sait que ark, que on-fait-pas-ça. Elle a même une moue de culpabilité qu'elle nous sert pour ces occasions. J'avais pas envie, moi, dans la vie d'avoir une échelle de préférence dans les manières de gérer du jus de corps. Je ne voulais pas me dire que j'aime plus quand ils font cela sur le pot que dans la couche que sur-le-mur-dans-le-lit-plein-le-bébé. Non. Je ne voulais pas.

Je sais que c'est juste une phase. Tout ce qui est désagréable, avec les petits, n'est qu'une phase. Ça passe. Mais celle-là, elle a intérêt à passer vite. Parce que la cote d'amour de Fille prend, pas dans l'absolu, là, juste dans le momentané, une débarque. Nécessairement que je préfèrerais juste fermer la porte de sa chambre et entrer dans un profond stade de déni du réel. Cette petite chose qui en applaudissant de ses mains beurrées et qui en sprinkle un peu partout ne peut pas être de moi. Sauf que oui, elle l'est. Et c'est là, dans le ridicule et l'absurde, notamment le moment où j'ai eu besoin de gratter, pas avec mes ongles, je précise, le stuff qui avait un peu séché sul mur, que j'ai, encore une fois, éprouvé tout le vaste du champ de l'amour inconditionnel qu'est celui qu'on ressent pour nos enfants. Je ferais ça pour personne d'autre. Personne d'autre y resterait tout collé et une horreur de sa personne. Mais Fille. Ben, je la prends par où elle est prenable, je la mets dans le bain, je la lave, à l'eau un peu tiède, je l'avoue, je la sèche, je l'habille, je lui trouve une occupation, je lave le bain, puis son mess, pis c'est long, quand même, je peux pas vraiment faire ça en lâche, faut que je m'applique. Tout ça avec le vomi dans la gorge et le désespoir dans chaque coup de guenille. Pis quand je reviens à elle, ben, elle a ce don de venir mettre sa tête dans mon coup, me donner un bisou pis toute là. Pis je retrouve des mots, l'envie de lui parler, de la considérer pour autre chose que du terrible. J'ai presqu'envie de lui faire un High Five pour marquer que "hé, on est passé au travers de ça, on est sans doute plus fortes de nous-mêmes". Mais je me retiens. Elle pourrait y voir de l'encouragement. Elle n'en a pas besoin.