jeudi 29 décembre 2011

Les considérations d'une mère suicidaire ou 9 mois

Le titre en dit beaucoup.

Je me suis demandée si c'était une bonne idée de témoigner de cette "expérience". Il y a de ces expositions qui exposent plus que d'autres, celle-ci en est une. Aux jugements, à l'indignation, aux regards accusateurs. Mais s'il y a une chose qui m'a profondément troublée avec ce blog, c'est le nombre de mamans qui m'ont fait part de leur désarroi, leur solitude, leurs angoisses.

So, I don't give sh*t.
Pas que je sois arrogante, seulement que... rien, en fait. Je n'ai pas de raison, c'est plutôt un impératif. 

Je n'entrerai pas dans les détails qui m'ont conduit à un matin de trop. La seule chose qui importe est que vous sachiez qu'une idée me frappait le corps et l'esprit, depuis le mois d'août. Des vagues. De sombres vagues. De trois à quatre par semaines, elles ont atteint une dizaine, par jour. Et cette "idée" devenait de plus en plus claire, de plus en plus éclatante, cartésienne, une évidence de chez évidence. Il y a un mois et un dodo, au réveil, le ciel était un peu trop gris.
Insupportablement trop gris.
Et j'ai cru - vraiment cru - que la Terre tournerait mieux si je la délestais du poids de mon corps, que mes enfants seraient plus heureux avec une mère autre que moi, que mon amoureux serait plus heureux avec une autre que moi. Et dans ce portrait, tout le monde gambadait, se lançait des fleurs, se bourrait de barbe à papa... La joie de mon inexistence.

Ouin.

Merci à une visite inattendue chez ma belle-mère qui l'a empêchée de garder Fifille, au Mari qui m'a conduit à l'hôpital et au psychiatre qui - après m'avoir si humainement écoutée - a clamé ma souffrance et m'a retirée du monde, pour un temps, celui que je revienne un peu à moi, que je remonte un bout de la pente descendue.

Si je raconte tout cela, c'est parce qu'avec le tout petit espace que j'ai pour regarder le dernier mois, je me dis qu'aucune maman ne devrait vraiment croire qu'elle embrasse son fils pour la dernière fois - et pour le mieux de ce dernier... Parfois, demander de l'aide, parler, est de trop. C'était l'un de ces cas. Je ne sais pas si j'espérais que quelqu'un agisse à ma place, ne m'écoute pas, je sais pas... mais je sais que ce que je souhaite dire, là, tout de suite, maintenant, c'est qu'il ne faut pas supporter de voir des yeux s'éteindre chez autrui, de regarder la lassitude l'envahir, le goût de la vie lui sortir de la bouche... Nous avons le droit d'intervenir dans la vie de ceux et celles que l'on aime parce qu'il arrive que ces derniers et dernières aient le regard trop embué pour voir le monde de la "bonne" façon. Et je ne dis pas que mon mal-être et son soulagement étaient la responsabilité des autres, loin de là.

Ouin (bis).

Fifille a neuf mois, aujourd'hui. Et je suis avec elle. Avec le Fils. Avec le Mari. Je suis encore là.
Fragile, mais là. 

5 commentaires:

  1. Tellement contente que tu sois encore là Véro! Tu sais que tu as marqué ma vie et que tu m'as fait découvrir ce dont j'étais capable, à un moment où j'en avais vraiment besoin ? Tu m'aurais drôlement manqué toi que je n'ai pas vu depuis des années!!! Embrasses les tiens en te disant qu'il n'est pas arrivé le moment où ce sera pour la dernière fois. Prends soin de toi. Si tu veux m'écrire, notamment pour ton contrat des prochaines semaines (15 je crois), tu peux le faire à bq.rodrigue@gmail.com . Bises, xxxx, Isabelle

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  2. Heureuse d'apprendre que t'es encore là et merci pour le partage de ton expérience, encore fragile. Laisse les autres t'aider.

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  3. Je suis heureuse de te lire encore, merci de ta franchise, merci d'oser, merci de te dire.
    Je suis là, tout près. Je t'appelle bientôt.
    Profite des bisous, clins d’œil et câlins de tes précieux, tout passe si vite.
    Mélanie Philibert
    Je te fais de gros câlins tous doux

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  4. Merci pour ton témoignage, tellement émouvant... Je suis tellement tannée du tabou qui persiste autour de la maladie mentale... Ton texte est important pour ça, parce qu'il fait fi du tabou. Merci infiniment!

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  5. Merci pour ton témoignage, tellement émouvant... Je suis tellement tannée du tabou qui persiste autour de la maladie mentale... Ton texte est important pour ça, parce qu'il fait fi du tabou. Merci infiniment!

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